Paname : Mieux comprendre les liens entre ville et santé
En ville, pollution atmosphérique et stress thermique font partie des phénomènes au cœur des préoccupations des politiques publiques. Alors qu’une étude place Paris au 4e rang des villes européennes pour la mortalité due à l’exposition au dioxyde d’azote (NO2), les habitants des Paris sont soumis à un deuxième risque majeur pour la santé, responsable d'un grand nombre de surmortalités : le stress thermique, un terme qui désigne le fait que certaines fonctions vitales du corps humain peuvent ne ne plus être assurées en cas de chaleur trop importante, jusqu’à pouvoir entraîner le décès … Les canicules étant amenées à poursuivre leur croissance (sévérité, durée, intensité) en ville du fait du changement climatique, il est dès lors crucial de croiser les données météorologiques avec les données sanitaires, dans une approche fortement interdisciplinaire, pour mieux comprendre quels sont les impacts sanitaires de la pollution atmosphérique et du stress thermique. C’est ce que font les deux campagnes et projets Pollusport et H2C.
Chaleur, qualité de l’air et santé en ville
La recherche en épidémiologie montre des relations à court terme entre température, pollution atmosphérique et santé, avec des impacts particulièrement élevés en conditions extrêmes de canicule. En ville, l'îlot de chaleur urbain (ICU) amplifie les températures élevées. Pourtant, peu d'études épidémiologiques se sont intéressées à son influence sur la santé. En effet, une grande complexité subsiste dans la compréhension de sa variabilité spatio-temporelle. La prévention des risques liés à la chaleur et à la qualité de l’air est un enjeu de santé publique majeur en ville.
Pour adapter les mesures de prévention et améliorer la pertinence des prévisions météorologiques et de qualité de l'air, une meilleure compréhension des variations à l’intérieur de la ville de l'exposition des habitants à la chaleur et à la pollution atmosphériques en été est nécessaire.
Le projet ANR H2C (“Heat and Health in Cities"), par une démarche interdisciplinaire, vise à combler les lacunes actuelles de ces différents champs de recherche dans le but d'améliorer les services climatiques urbains pour soutenir les politiques de prévention de la chaleur et la prise de décision à court (alertes) et à long terme (planification urbaine).
L’approche retenue est de croiser les données épidémiologiques avec des données atmosphériques (températures, qualité de l’air …) afin de mettre en exergue les indicateurs qui ont un impact sur les épisodes de surmortalité ou morbidité. Il faut pour cela d’une part constituer des longues séries de données météorologiques sur la région Ile de France, et d’autre part accéder aux informations sanitaires, ce qui est rendu possible dans le cadre du partenariat avec Santé publique France. L’idée est d’étudier différents arrondissements et communes de banlieue, avec des caractéristiques urbaines différentes et des taux de mortalité et morbidité différents.
La campagne de mesures permettra de mieux connaître la dynamique de la couche limite en période chaude d’été, son effet sur les températures de l’air à 2m et les indices de stress thermique, ainsi que son impact sur la formation potentielle de petits nuages en journée au-dessus de l’agglomération. L’effet radiatif des aérosols urbains sera aussi quantifié.
En savoir plus sur H2C
- Période de la campagne parisienne :13 juin - 8 juillet
- H2C étudie l’impact de la qualité de l’air et de la chaleur sur la santé.
- Instruments utilisés :
- Lieux-clés : Site LISA-UPC (Paris 13e), Site Qualair-SU (Paris 5e), Grue de Notre de Dame de paris (Paris 5e) , Quai de Bercy (Paris 12e), Observatoire atmosphérique SIRTA (Palaiseau), Site Météo-France à Roissy-CDG.
- Organisme/ Laboratoire porteur : CNRM (CNRS / Météo-France)
- Laboratoires ou organismes impliqués dans les mesures: CNRM, LHEEA Nantes, CSTB, IPSL, Santé Publique France, PRODIG, AirParif, Institut Paris Région
- Scientifique porteur du projet : Aude Lemonsu (CNRS), chercheuse au CNRM
- Financement : ANR
Qualité de l’air, santé et performance des sportifs
Dans le précédent article, nous avons évoqué la qualité de l’air en ville et abordé l’enjeu sanitaire. Mais quel est l’impact de la qualité de l’air en ville sur des populations spécifiques ?
La pratique du sport, et notamment celle de la population des athlètes de haut niveau, est au cœur de la campagne Pollusport, qui étudie l’effet de la qualité de l’air en milieu urbain sur leur santé et sur leurs performances. La pratique du sport est en effet associée à des volumes d’air inhalés plus importants, qui augmentent l’exposition aux polluants. Ainsi les athlètes développent fréquemment des pathologies respiratoires et notamment de l’asthme. Qu’ils s’entraînent en intérieur ou en plein air, les sportifs sont en effet exposés à des polluants atmosphériques. En air intérieur, les matériaux (colles, peintures …) sont sources de composés organiques volatils (COV), mais il y aussi des moisissures et des particules (dont certaines ont des sources spécifiques comme la magnésie, utilisée par les gymnastes ou les haltérophiles). La ventilation joue un rôle clé dans l’accumulation des polluants et dans leur transfert depuis l’extérieur. À l’extérieur, on retrouve les polluants des environnements urbains : dioxyde d’azote, ozone, particules fines (dont la suie, la matière organique ..), auxquels il faut ajouter les pollens.
L’objectif de la campagne Pollusport est de mieux caractériser la qualité de l’air dans les enceintes sportives et l’exposition des athlètes. Le second objectif est de mettre en exergue les liens entre cette qualité de l’air d’une part et d’autre part la santé et la performance des sportifs. Cette campagne se déroule en deux phases. La première a déjà eu lieu, en mai-juin 2021, dans le stade Pierre-de-Coubertin, dans le 16e arrondissement à Paris dans le cadre du programme de recherche Ville, Sport, Santé du DIM QI2. Elle visait à évaluer la composition de l’air à l’intérieur du stade et à comprendre comment les polluants y pénètrent et circulent, de manière à être en capacité de modéliser la qualité de l’air dans la salle. La deuxième phase sert le second objectif, et débute actuellement. Il s’agit de suivre pendant deux ans à la fois la santé d’une cohorte de sportifs, mais aussi leurs performances et leur exposition. Pour ce faire, les sportifs devront remplir des questionnaires sur leur santé, subiront régulièrement des prélèvements sanguins qui permettront de suivre le cas échéant des marqueurs d’inflammation reliés à la pollution de l’air. Leurs performances seront aussi analysées. Un des défis sera de caractériser l’exposition des athlètes en tenant compte des différents environnements fréquentés ; une station de qualité de l’air sera installée à l’INSEP (Bois de Vincennes), des campagnes ponctuelles seront réalisées dans les environnements intérieurs et des expériences d’utilisation des micro-capteurs seront réalisées. L’approche étant nécessairement pluridisciplinaire, l’équipe reçoit notamment de l’aide de médecins, d’épidémiologistes et de physiologistes du sport.
En savoir plus sur Pollusport
- Période de la campagne parisienne début septembre 2022- septembre 2024
- Pollusport étudie l’impact de la qualité de l’air sur la santé et les performances des grands sportifs
- Instruments utilisés : micro-capteurs pour les sportifs, fidas pour les particules fines Analyseur d’ozone, Analyseur d’oxyde d’azote, étalomètre pour mesurer les suies, Aerotape pour mesurer les pollens, station météo pour la hauteur de la couche limite, ACSM pour mesurer de la fraction chimique de la composition de l’aérosol qui font moins d’1 micromètres
- Lieux-clés : Cœur du Bois de Vincennes, site de l’Insep
- Organisme/ Laboratoire porteur : LISA-IPSL (UPEC/UPC)
- Laboratoires ou organismes impliqués dans les mesures: LSCE-IPSL, CEREA, INSEP
- Scientifique porteur du projet : Gilles Foret (LISA/UPEC)
- Financement : Région IDF, ANSES