Une migration rapide des magmas sous les montagnes d’Oman

Résultat scientifique Terre Solide

Les montagnes d'Oman sont formées d'un lambeau de plaque tectonique océanique, posé sur le continent, offrant 10km d'épaisseur de manteau à observer. C'est même le soubassement d'une dorsale -le lieu où la croûte océanique se créée grâce à un volcanisme continu- qui s'y trouve fossilisé; un site idéal pour étudier la migration de magma. En combinant cartographie et géochimie des roches d'Oman, trois membres du CRPG, et deux chercheuses des universités de Montpellier et Oslo, changent profondément notre vision de ces processus.

Pour modéliser la migration des liquides de fusion dans le manteau solide, nous faisons souvent une analogie avec la percolation de l'eau dans les roches poreuses. Dans ces modèles, le liquide migre à des vitesses de quelques mètres par an.

Quand le liquide de fusion circule à 1200°C dans le manteau, il se charge en éléments solubles, laissant derrière lui une roche appauvrie, appelée la dunite. La cartographie montre que la dunite que l’on imaginait abondante sous forme de chenaux verticaux à l'aplomb de la dorsale, est en fait peu présente. Elle se trouve surtout sous la base de la croûte, dans un niveau horizontal, et plus profondément dans le manteau, sous forme de petites veines. Le contraste de composition en osmium entre manteau et liquide de fusion, permet de quantifier le degré d'interaction entre les roches et le liquide qui les a traversées. On découvre que les veines ont des compositions "mantelliques", ce qui implique un contact roche/liquide limité, mais les dunites en base de croûte ont une composition proche de celle du liquide. Que ce serait-il passé si le liquide avait percolé lentement dans le manteau avant d'atteindre ces dunites ? Sa composition se serait rapprochée de celle du solide, et il n'aurait plus eu le pouvoir de changer la composition de la dunite en base de croûte. Conclusion, le liquide a migré dans des filons capables d'avancer d'un kilomètre par jour, une vitesse 35 000 fois plus rapide que celle souvent envisagée !

 

En montant vers la croûte qui coiffe la montagne, un géologue suit la circulation, discrète et plus rapide que prévue, du liquide magmatique, depuis le manteau vers la surface.© D. Jousselin

Pour en savoir plus

Osmium isotope evidence for rapid melt migration towards the Moho in the Oman ophiolite (par Delphine Klaessens, Laurie Reisberg, David Jousselin, Marguerite Godard, Claire Aupart, publié à Earth and Planetary Science Leters, 2021)

https://doi.org/10.1016/j.epsl.2021.117111

Contact

David Jousselin
Centre de recherches pétrographiques et géochimiques (CRPG)