Méditerranée : La recharge des aquifères
Les ressources en eau de la plupart des zones méditerranéennes proviennent pour une large part des zones montagneuses situées en amont des bassins versants. Ces zones amont reçoivent suffisamment de précipitations, dont une partie sous forme de neige, pour générer des écoulements de surface qui sont fortement mobilisés en aval par l’agriculture irriguée. Toutefois, une part importante des précipitations s’infiltre en profondeur et va recharger les aquifères localisés en aval. Dans les zones de plaine, l’exploitation croissante de cette eau souterraine a pour conséquence un abaissement généralisé des niveaux des nappes, mettant en danger la durabilité des agro-systèmes méditerranéens. Il est donc crucial de comprendre le fonctionnement hydrologique de ces systèmes et en particulier les processus de recharge des aquifères depuis l’amont. Si l’impact du changement climatique sur l’enneigement et les débits des rivières retient déjà l’attention de la communauté scientifique, ses conséquences sur la recharge des nappes restent aujourd’hui mal connues.
Ce manque de connaissance est dû à la complexité des processus en jeu ainsi qu’à l’impossibilité d’observer directement les flux souterrains. Néanmoins, l’étude de la composition chimique et isotopique de l’eau permet d’obtenir des informations sur son cheminement souterrain et sur les interactions entre les différentes masses d’eau. Cette composition est influencée, entre autres, par l’altitude à laquelle sont tombées les précipitations, ainsi que par le taux d’évaporation qu’elles ont subi avant de s’infiltrer. Une autre approche pour évaluer la recharge se base sur le bilan hydrique d’un bassin. A partir de la connaissance des précipitations, des débits de surface et de l’évapotranspiration, il est possible de déduire la fraction infiltrée en profondeur grâce à l’équation de fermeture du bilan hydrologique. Ces connaissances permettent alors de modéliser les processus de recharge et de tester des scénarios de gestion ou d’impact des changements climatiques.
Une incertitude majeure est associée à la quantification de l’évapotranspiration très mal connue ou modélisée en montagne. Cette modélisation est également tributaire des observations in situ qui font souvent défaut pour la calibration ou validation des modèles. Il est donc fondamental de maintenir des observatoires pérennes pour mesurer régulièrement les variables météorologiques, les débits des rivières, l’hydrochimie, le niveau des nappes, les flux liés à l’irrigation, etc. C’est grâce à la complémentarité entre observation de terrain, observation satellitaire et modélisation que nous pourrons fournir les informations nécessaires pour une gestion optimale des ressources en eau et déterminer des répartitions soutenables des usages tenant compte des changements climatiques en cours.
Auteures et auteurs
Vincent Simonneaux1 , Lahoucine Hanich2 , Laurence Vidal3 et Younes Fakir4
- 1IRD / CESBIO (Toulouse, UMR 5126, UPS-CNRS-CNES-IRD) Laboratoire Mixte International TREMA (Université Caddi Ayyad, Marrakech)
- 2Université Cadi Ayyad, Faculté des Sciences et Techniques, Marrakech - Université Mohamed VI Polytechnique, Centre for Remote Sensing and Application (CRSA), Benguerir, Maroc
- 3Aix Marseille Université, CNRS, IRD, INRAE, Coll France, CEREGE, Aix-en-Provence, France
- 4Université Cadi Ayyad, Faculté des Sciences Semlalia, Marrakech, Maroc - Université Mohamed VI Polytechnique, Centre for Remote Sensing and Application (CRSA), Benguerir, Maroc
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