Tranchée réalisée à travers l’escarpement de la faille de San Ramon qui émerge en surface, près de Santiago au Chili. La faille de San Ramon est susceptible de produire des séismes de magnitude importante avec un foyer à faible profondeur (moins de 15 km)© Robin LACASSIN/IPGP/CNRS Images

Nouvelles perspectives sur la sismicité : un pont entre essaims sismiques, glissements lents et fluides souterrains

Résultat scientifique Terre Solide

Une étude réalisée par des scientifiques du CNRS Terre & Univers (voir encadré) et de l’INGV de Bologne ouvre de nouvelles perspectives sur les essaims sismiques et la sismicité induite en les rapprochant des mécanismes des glissements lents. Leurs travaux éclairent davantage les mécanismes de déclenchement de la sismicité, permettent de mieux comprendre le rôle de la déformation asismique, et ouvrent de nouvelles pistes pour contraindre les processus physiques sous-jacents à des séquences sismiques encore mal comprises. 

La sismicité mondiale s’organise en plusieurs types de séquences. Pour les séquences « choc principal – répliques », un séisme majeur est suivi de nombreuses répliques plus petites dont le nombre diminue avec le temps. A l’inverse, les essaims sismiques se caractérisent par une activité sismique continue, s’étalant de quelques heures à plusieurs jours. Ces essaims se manifestent dans divers contextes tectoniques (zones de subduction, rifts, failles transformantes, etc.) mais aussi dans des environnements liés à l’activité humaine, comme l’injection de fluides dans le sous-sol (par exemple, dans le cadre de la géothermie profonde). Dans les zones de subduction, des glissements lents sont également observés, marqués par un déplacement dit asismique pouvant s’accompagner de trémors et de séismes à basse fréquence. 

Une migration des foyers sismiques a été fréquemment constatée au cours de ces phénomènes, se propageant le long des failles avec le temps. Cette migration peut offrir des indications précieuses sur les processus hydromécaniques à l’œuvre en profondeur, mais elle demeure encore mal comprise. L’étude de Philippe Danré (réalisée lors de sa thèse) et ses collaborateurs repose sur une comparaison globale des phénomènes de migration de la sismicité, à travers plus d’une centaine de séquences provenant de contextes tectoniques variés. Les auteurs identifient une certaine régularité dans la vitesse de migration en fonction de la durée de la séquence, leur permettant de définir deux domaines distincts : l’un associé aux épisodes bien documentés de glissements lents, et l’autre aux épisodes induits par la circulation de fluides en profondeur. Cette dichotomie fournit un outil précieux pour identifier les mécanismes à l’origine des essaims ou des séquences sismiques de précurseurs. 

De plus, le moment libéré lors des essaims induits par les fluides montre un comportement similaire à celui des glissements lents, lorsque la contribution asismique de la déformation est prise en compte. Les auteurs introduisent ainsi un troisième comportement de déformation, en complément des tremblements de terre classiques et des séismes lents : celui des essaims sismiques induits par les fluides. 

Vitesse de migration de la sismicité en fonction de la durée pour différent types de séquences induites par les fluides (FI) et par des glissements lents (SSD) dans le monde. Les résultats soulignent que les deux séquences peuvent impliquer une dynamiquesimilaire, mais qu'elles diffèrent par leurs causes sous-jacentes.

Laboratoire CNRS impliqué

  • Laboratoire Géoazur (GEOAZUR - OCA)

    Tutelles : CNRS / IRD / OCA

Philippe Danré, qui a réalisé ces travaux lors de sa thèse et contrat post-doctoral (ANR INSeis, Responsable : Louis De Barros) à Géoazur, va maintenant poursuivre son post-doctorat à Strasbourg (laboratoire ITES).

Pour en savoir plus

Danré, P., De Barros, L., Cappa, F. et al. Parallel dynamics of slow slips and fluid-induced seismic swarms. Nat Commun 15, 8943 (2024). 

Contact

Philippe Danré
Chercheur CNRS à l'Institut Terre Environnement Strasbourg (ITES)
Louis De Barros
Enseignant chercheur de l'université Côte d'Azur au laboratoire Géoazur (GEOAZUR - OCA)
Frédéric Cappa
Enseignant chercheur de l'université Côte d'Azur au laboratoire Géoazur (GEOAZUR - OCA)