Impact de l’invasion russe sur les cultures de blé en Ukraine

Résultat scientifique Surfaces continentales

En mars 2022, la Russie envahit une partie du territoire ukrainien. L’Ukraine étant le cinquième exportateur de blé à échelle mondiale, cette guerre a contribué à renforcer une crise alimentaire mondiale rampante. Cependant, les effets de la guerre sur les différents maillons de la chaîne d'approvisionnement, depuis la parcelle agricole jusqu’au terminal portuaire, sont complexes à démêler. En particulier, l’impact de la guerre en termes de rendement dans les parcelles n’avait pas été quantifié. A travers cette étude, nous avons montré que la guerre avait causé un déclin de 20 % de la biomasse produite dans les parcelles de blé à proximité des zones de combat. Des scientifiques du CNRS Terre & Univers (voir encadré), ont interprété ce résultat comme la conséquence d’un abandon des cultures par les agriculteurs, ce qui aurait causé un déficit d’irrigation et surtout en apports azotés en cours de campagne.

Ces conclusions ont été obtenues à partir de la chaine de traitement AgriCarbon-EO, développée au CESBIO (voir encadré), qui combine un modèle de croissance des cultures avec de l’imagerie satellitaire pour estimer la biomasse à une échelle fine jamais atteinte (résolution spatiale : 10 m)1 . Les observations satellitaires sont indispensables pour obtenir une représentation réaliste de l’évolution des cultures en l’absence de données de terrain, comme c’est le cas en zone de guerre mais aussi dans des zones peu accessibles, et/ou peu dotées en moyens techniques et humains qualifiés. Ces images fournies par la mission Sentinel-2 ont été prétraitées par le logiciel de correction atmosphérique MAJA, conçu au CESBIO et développé au CNES. La classification des parcelles de blé a été réalisée par Kermap une startup qui utilise des méthodes d'intelligence artificielle pour identifier les types de culture à l’échelle européenne.

Cette étude montre l’apport de la télédétection pour analyser la production agricole à grande échelle dans des régions difficiles d’accès comme les zones de guerre. Elle met en lumière que la guerre perturbe la chaine d'approvisionnement céréalière depuis la parcelle agricole, et pas seulement dans la partie « transport ». Elle ouvre des perspectives pour l’analyse en temps réel des conditions agricoles à une échelle fine dans les zones fortement perturbées (conflit, évènement climatique).

 

  • 1https://doi.org/10.5194/gmd-17-997-2024
Cartographie de la biomasse dans les parcelles de blé dans deux régions d’Ukraine (Poltava au nord et Kherson au sud). Une chute de biomasse est visible dans la région de Kherson en 2022 seulement, confirmant qu’elle a été causée par l’invasion russe.© Cf référence

Laboratoire CNRS impliqué

  • Centre d’études spatiales de la biosphère (CESBIO - OMP)

    Tutelles : Université Toulouse III - Paul Sabatier / CNRS / IRD / CNES

Pour en savoir plus

Antonenko, V., Al Bitar, A., Danylenko, I., Wijmer, T., Colin, J., Dejoux, J.-F., Lefebvre, A., Knibbe, M., Ceschia, E., & Gascoin, S. (2024). Impact of the Russian invasion on wheat biomass in UkraineEnvironmental Research Letters

Contact

Simon Gascoin
Chercheur CNRS au Centre d'études spatiales de la biosphère (CESBIO-OMP)
Ahmad Al Bitar
Ingénieur de recherche CNRS au Centre d'études spatiales de la biosphère (CESBIO-OMP)