Évaluation de l'exploitation minière des fonds marins sur la santé des océans
De nos jours, la demande mondiale en ressources métalliques ne fait qu’augmenter en raison de la croissance démographique, de l'industrialisation, de la numérisation, et du développement des technologies et des produits à faibles émissions de carbone. Parmi ces métaux dont la demande est croissante on peut citer le lithium (Li) indispensable aux batteries lithium et le strontium (Sr) utilisé dans les moteurs électriques. Ces éléments dont le fort intérêt économique est associé à un risque de manque d’approvisionnement élevé sont considérés comme des "matières première critiques" par l'Union européenne. Par conséquent, plusieurs études examinent la faisabilité d'extraire le Li et le Sr de l'eau de mer, et en particulier le Li des sources hydrothermales qui contiennent 10 à 20 fois plus de Li que l'eau de mer. Cependant, les processus d’exploitation minière pourraient conduire au relargage de divers éléments chimiques notamment ceux impactant la vie océanique et ainsi provoquer un effet majeur sur le fonctionnement de l’océan et sur sa capacité à stocker du dioxyde de carbone atmosphérique.
Une équipe scientifique française pilotée par le laboratoire Géosciences et environnement Toulouse (GET/OMP, CNRS / IRD / UPS / CNES) en collaboration avec le Laboratoire d’Océanographie Physique et Spatiale (LOPS, Univ Brest-CNRS-IFREMER-IRD-IUEM) et le Laboratoire des Cycles Géochimiques et Ressources (LCG, IFREMER) a mené une étude pour contraindre comment et où le Li et Sr issus des ressources minérales hydrothermales des fonds océaniques sont dispersés dans l’océan. Cette étude a été réalisée au niveau du champ hydrothermal Lucky Strike (1700 m sous le niveau de la mer, océan Atlantique) qui fait l’objet d’un suivi continu depuis 2010 dans le cadre de l'observatoire européen EMSO-Azores. Les résultats mettent en évidence que le Li et Sr d’origine hydrothermale peuvent être détectés dans la colonne d’eau à plus d’1 km de sa source d’émission, modifiant ainsi la composition de l’océan profond (Figure). De plus, leur dispersion spatiale est affectée par les courants locaux et les interactions avec les minéraux produits par l’activité hydrothermale. Des études complémentaires sont en cours afin de déterminer si en plus d’impacter la composition chimique de l’océan profond, le Li et Sr d’origine hydrothermale impactent la diversité et le développement des écosystèmes en milieu extrême.
Pour en savoir plus
Artigue L., Chavagnac V., Destrigneville C., Ferron B., Cathalot C., 2021. Tracking the lithium and strontium isotope signature of hydrothermal plume in the water column: A case study at the EMSO-Azores deep-sea observatory. Frontiers in Environmental Chemistry