Canicules en ville et neutralité carbone : Le potentiel de la géothermie
Avec une ou deux canicules annuelles prévues à l’horizon 2100 en région parisienne, et des températures maximales avoisinant les 50 °C (contre 9 périodes de canicules observées sur la période 1960-1990 et une température maximum de 38 °C), notre capacité à refroidir les agglomérations comme Paris s’avère cruciale. Comment cependant développer des solutions compatibles avec l’indispensable objectif de neutralité carbone ? Le développement de la géothermie de surface en Ile de France pourrait-il être une solution ?
La géothermie, c’est-à-dire la mobilisation de la chaleur contenue dans le sous-sol, est l’une des méthodes permettant en effet de réaliser la transition énergétique. Cette énergie est en effet présente partout à la surface de la Terre, bas carbone, renouvelable, non intermittente et elle peut être produite localement ! En France, deux types de géothermie sont utilisés : la géothermie de surface et la géothermie profonde.
La géothermie de surface exploite la chaleur à une profondeur superficielle du sous-sol, inférieure à 200 m. Particulièrement adaptée pour des besoins individuels ou collectifs de petite taille, comme les écoles ou les hôpitaux, elle permet de chauffer, alimenter en eau chaude sanitaire, et également de fournir de la fraîcheur.
La géothermie profonde, quant à elle, exploite la chaleur de l’eau géothermale présente entre 500 m et 2 500 m de profondeur pour alimenter des réseaux de chaleur urbains (température supérieure à 30°C). Elle est adaptée à de gros réseaux de distribution, par exemple pour des habitats collectifs de quartiers entiers, pouvant typiquement chauffer 5 000 à 6 000 logements.
Avec 20 % de la population française, les besoins en énergie thermique (chaleur, eau chaude sanitaire et climatisation) de l’Île-de-France sont énormes : environ 90 TWh par an. En 2020, cette région comptait 50 installations de géothermie profonde en exploitation, fournissant 1.7 TWh d’énergie, soit moins de 2 % de l’énergie totale utilisée. L’Île-de-France est tout de même l’une des régions du monde concentrant le plus d’unités de production géothermique. La majeure partie de ces installations utilisent la géothermie profonde et extraient la chaleur essentiellement depuis une couche géologique constituée de calcaires d’âge jurassique moyen et présente à environ 1 500 m de profondeur : l’aquifère du Dogger.
À l’inverse de la géothermie profonde, la ressource géothermique de surface est très largement sous-utilisée en Île-de-France, et ne couvre qu’une part négligeable de l’énergie nécessaire en chaleur ou production de fraîcheur de la région. En permettant de facilement fournir également du froid durant l’été, elle possède pourtant un avantage considérable dans le contexte qui est le nôtre. Ce rafraîchissement peut passer par les pompes à chaleur, mais également par le géocooling, qui utilise la température faible du sous-sol (12 °C) pour rafraîchir directement et naturellement des bâtiments.
Le développement intensif de la géothermie de surface et profonde sur l’ensemble de la région Île-de-France semble donc une piste très prometteuse pour que les zones urbaines de la région atteignent une neutralité carbone en termes de chauffage et de refroidissement des bâtiments. Mais si nous voulons prendre le virage de la géothermie, améliorer nos connaissances géologiques du sous-sol des zones urbaines et former de jeunes géologues, experts des descriptions des roches ou des techniques de forage géothermique devient crucial !
Auteur
Benjamin Brigaud, enseignant chercheur de l'Université Paris-Saclay à Géosciences Paris-Saclay (GEOPS)
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La géothermie, enjeu majeur pour la neutralité carbone des zones urbaines, Benjamin Brigaud, The Conversation