A2S2 : nouvel instrument aéroporté pour mesurer le profil atmosphérique vertical d'absorption par les aérosols

Océan Atmosphère

Les aérosols diffusent et absorbent le rayonnement solaire, ce qui a plusieurs conséquences. Par diffusion, ils renvoient une partie du rayonnement solaire vers l’espace, entraînant un refroidissement local de l’atmosphère. À l'inverse, l’absorption du rayonnement solaire par les aérosols conduit à un réchauffement atmosphérique. Les aérosols vont ainsi impacter à la fois le cycle de l’eau et celui du carbone.

Les aérosols impactent le bilan radiatif de manière directe, mais également de manière indirecte en modifiant le cycle de vie et les propriétés des systèmes nuageux, ce qui a des conséquences sur le cycle de l’eau. Les propriétés d’absorption des aérosols déposés sur la neige et la glace augmentent la quantité de rayonnement absorbée par ces surfaces et en accélèrent la fonte. D’autre part, selon leurs propriétés d’absorption, les aérosols affectent le rayonnement disponible pour la photosynthèse dont dépend la productivité primaire des écosystèmes, et donc le cycle du carbone.

La prédominance du refroidissement ou du réchauffement dépend des propriétés optiques des aérosols, en lien avec leur composition chimique. L'absorption du rayonnement solaire est avant tout causée par l’aérosol de carbone suie, le deuxième plus grand contributeur au réchauffement global après les gaz à effet de serre, mais également par le carbone organique et les poussières désertiques qui dominent l’absorption aux courtes longueurs d'ondes (370-500 nm). La séparation de l'absorption totale par les aérosols selon leur composition chimique et selon leur répartition verticale, qui induit une réponse spécifique de la couverture nuageuse (effet semi-direct), est donc essentielle pour réduire les incertitudes des modèles et des satellites dans l’estimation du forçage radiatif ainsi que pour établir des politiques de contrôle de la qualité de l’air reposant sur des bases scientifiques.

Grâce à un financement du programme mi-lourds du CNRS-INSU, le Laboratoire inter-universitaire des systèmes atmosphériques (LISA), en collaboration avec le CNRM et la société Aerodyne, a développé un nouvel instrument aéroporté basé sur le capteur commercial CAPS-PMSSA, pour mesurer simultanément le profil vertical en conditions ambiantes de la diffusion et de l'extinction optique par les aérosols à 450 et 630 nm. L’instrument, nommé A2S2 (Aerosol Absorption Spectral Sizer), a été caractérisé au laboratoire pour définir les performances et les conditions opératoires aéroportées, en particulier la précision à basse pression et haute fréquence de mesure, ainsi que les facteurs correctifs de la diffusion selon la taille des particules (erreur de troncature). 

L’instrument A2S2 au sein de la plateforme aéroportée AVIRAD du LISA sur l’ATR-42 de Safire pendant la campagne ACROSS. © Référence

L'instrument est intégré au sein de la plateforme aéroportée AVIRAD du LISA. Il a été opéré pour la première fois sur l’ATR-42 de Safire au cours de la campagne ACROSS en région parisienne, à l’été 2022, pour étudier les propriétés des mélanges entre masses d’air anthropiques et biogéniques.

Les mesures par l’A2S2 ont montré que, à l’échelle régionale, l’albédo simple de diffusion moyen est de 0.86 et 0.88 à 450 et 630 nm, respectivement. Cela suggère une contribution importante des aérosols organiques à l’absorption. 

Profil vertical de l’albédo simple de diffusion à 450 nm pendant la campagne ACROSS. L’absorption par les aérosols dans les basses couches est légèrement supérieure à celle observée dans la troposphère libre. © Référence

À l’été 2023, l’instrument a été utilisé au cours de la campagne AERO-HDF dans les Hauts de France pour étudier la pollution locale et préparer la mission spatiale 3MI. À l’horizon 2026, l’A2S2 fait partie de la charge utile du projet BACCOPA, financé par l’ANR, qui verra l’ATR-42 au Congo pour étudier les aérosols issus des feux de forêts et leurs impacts sur la convection profonde.

Un agenda complet pour cet instrument qui ouvre des possibilités nouvelles pour l’étude de l’effet radiatif des aérosols, et qui, hors campagnes aéroportées, et éventuellement aussi opéré au sol. 

Laboratoires impliqués

Laboratoires CNRS Terre & Univers 

  • Laboratoire inter-universitaire des systèmes atmosphériques (LISA - EFLUVE)

Tutelles : CNRS / Université Paris Cité / UPEC

  • Centre national de recherches météorologiques (CNRM)

Tutelles : CNRS / Météo-France 

Autres

  • Aerodyne Research, Billerica, MA

  • Safire (Service des Avions Français Instrumentés pour la Recherche en Environnement), Francazal, France

Contact

Paola Formenti
Chercheuse au Laboratoire inter-universitaire des systèmes atmosphèriques (LISA)
Chenjie Yu
Chercheur au Laboratoire inter-universitaire des systèmes atmosphèriques (LISA)